Cerise-Peche-Abricot

Dimanche était donc ma première journée de formation à la Croix Rouge pour devenir secouriste. Se lever un dimanche matin à 7h, faut avouer que ça pique. Mais une fois arrivée au local, retrouver tout le monde, charger le camion et partir, j'ai tout oublié. Après une heure de trajet et de rigolades, nous sommes arrivés à Saint Brieuc là où les formateurs et d'autres bénévoles nous attendaient. On s'installe, on fait les présentations, un petit thé et c'est parti mon kiki. Nous étions une quinzaine assis en cercle. Les formateurs nous ont présenté grosso-modo en quoi allait consister la formation et nous voilà partis !

Beaucoup de théorie au début, les formateurs nous faisaient beaucoup participer en posant des questions, en nous faisant récapituler ce que nous avions vu précédemment, etc. Puis nous nous sommes répartis en deux groupes pour inspecter le matériel nécessaire pour partir en mission, rangé bien spécifiquement à sa place dans un gros sac rouge avec des bandes réfléchissantes. Pour moi, le matériel m'était pas trop inconnu. Ensuite, il fallait qu'on le range selon le protocole indiqué. Ca nous a prit un sacré temps pour tout compter, ranger chaque chose à sa place dans sa pochette de couleur.

Une pause d'une heure le midi où on s'est tous installé à une table pour discuter, faire connaissance avec les nouveaux, manger, rigoler tous ensemble. Poupinou m'avait préparé deux sandwichs mais tout le monde avait rapporté un truc que chacun partageait. C'était vraiment très convivial.

Retour de pause, encore de la théorie puis cette fois, on a vu le lavage des mains à l'eau et au savon, à la solution hydro-alcoolique et l'enlèvement des gants à usage unique. Là j'me suis vue repartir à l'école d'infirmière, où on m'a saoulée avec ça pendant trois ans et demi donc pas trop difficile pour moi..
Ensuite, toujours en groupe, nous avons vu les différents types de dégagement d'urgence d'une victime par traction. Poignets, chevilles, aisselles et à deux équipiers. Puis le dégagement dans les escaliers. Alors là, j'avais beau faire de mon mieux, mon dos en a prit un sacré coup. Evidemment, qui est ce qui devait faire la victime avec son poids plume, c'est bibi ! J'me suis faites de sacrées frayeurs dans les escaliers quand même.. Après, on a été dehors pour effectuer un dégagement d'urgence d'une victime dans un véhicule. Alors là, il pleuvait des cordes, c'était assez sympa mais comme je faisais la victime, ça allait encore ! xD
On est passé ensuite à l'obstruction partielle et totale des voies aériennes, après la théorie, la pratique avec les claques dans le dos, main à plat entre les deux omoplates et la méthode d'Heimlich sur un adulte et sur un nourrisson. D'ailleurs, j'en profite pour faire ma chieuse et vous rappeler qu'en cas d'obstruction partielle, il est INTERDIT de taper dans le dos, cela risquerait d'aggraver la situation. Dans ce cas, on laisse la personne tousser et se dégager elle même. Les claques sont à donner en cas d'obstruction totale des voies aériennes.
Et enfin, alors que tout le monde avait une tête comme une pastèque, on est passé à l'oxygénation. Et puis on s'est arrêté parce que tout le monde en pouvait vraiment plus. 

Un peu de rangement, au revoir à tout le monde et nous voilà reparti pour une heure de route. Arrivés au local, on a encore papoté tous ensemble, on a tous eu un peu de mal à se dire au revoir malgré la fatigue nette. Une copine m'a raccompagnée jusqu'à chez moi. Si bien que je suis rentrée à la maison à 21h.
Malgré le fait que je connaissais déjà une bonne partie de tout ce qu'on a vu, je me suis carrément éclatée, on est un groupe qui nous entendons super bien, on se connaît plus ou moins des maraudes et autres formations donc là, se retrouver tous ensemble, c'était génial. Moi j'me suis bien éclatée en tout cas et j'ai qu'une seule hâte, y retourner dimanche prochain ! La semaine prochaine on passe aux hémorragies et je sens qu'avec la confiture et le ketchup, ça va donner.. ! xD
Ce soir, je pars en maraude et je sens que ça va être ultra cool encore ! ^^

Vous le savez peut être pas mais depuis fin juin, la Croix Rouge occupe une place importante dans ma vie. J'me suis d'abord engagée auprès de l'action sociale en distribuant l'aide alimentaire, en tenant les vestiaires de l'aide vestimentaire. Puis j'ai intégré l'équipe des maraudeurs. J'ai passé deux formations, j'ai assisté à une réunion à la suite de laquelle je me suis inscrite sur la liste des bénévoles disponibles pour le plan grand froid.

Le plan grand froid c'est quoi ? C'est un plan ministériel qui prévoit un certain nombre de dispositions en cas d'hiver rigoureux.
En France, il existe trois niveaux:
Niveau 1 de "temps froid": Il est activé lorsque les températures sont positives la journée mais comprises entre 0 et - 5 °C la nuit.
Niveau 2 de "temps de grand froid": Il est activé lorsque les températures sont négatives la journée et comprises entre - 5 et - 10 °C la nuit.
Niveau 3 de "froid extrême": Il est activé lorsque les températures sont négatives la journée et inférieures à  - 10 °C la nuit.
A partir du niveau 2, l'organisation des maraudes changent. Au lieu de sortir une fois par semaine, on est dans l'obligation de sortir tous les jours. Parfois même en journée. On peut également être appelé à n'importe quelle heure de la nuit en renfort.

Ca c'était pour la petite histoire. Mais aujourd'hui, j'ai la possibilité d'évoluer encore en devenant secouriste. Ce qui me permettra de tenir des postes de secours lors de manifestations étudiantes, sportives, culturelles, etc..
Pour ça, j'ai cinq jours de formation qui se répartissent sur les quatre dimanches du mois de novembre et le premier dimanche du mois de décembre. La formation est gratuite pour moi. Elle se déroule à un peu plus d'un soixantaine de kilomètres de chez moi donc on se donne tous rendez-vous au local de ma ville et on file tous ensemble en camion au point de rendez-vous. A la suite de ces cinq jours, je valide un diplôme qui s'appelle le PSE 1 (Premiers Secours en Equipe de niveau 1.)

Ca commence donc ce dimanche, on a rendez-vous au local à 7h45, retour prévu pour 18h ! Et j'ai tellement hâte ! J'essaierai de vous faire un petit compte rendu de mes journées !

Lundi dernier, j'ai passé une journée de fou furieux les gens ! C'était au delà de toutes mes espérances et j'en ai pleuré dans le camion au retour. Ouais. J'étais en formation Croix Rouge et on était en simulation de catastrophe. D'abord, il faut savoir qu'on était en pré-alerte donc on a pas joué le jeu du début à la fin mais ç'aurait été trop compliqué.
C'était une simulation terre-air-mer donc d'importants dispositifs avait été mit en place. Il y avait les pompiers, la gendarmerie, les hélico de la marine, la SNSM (= Société Nationale de Sauvetage en Mer.), le SAMU, la préfecture maritime, la protection civile, la Croix Rouge, les douanes et bien d'autres personnes.. C'était des élèves de l'école de police qui jouaient les victimes. Ils étaient maquillés et portaient chacun une étiquette avec un rôle bien précis à jouer. Des femmes, des enfants, des hommes, des familles entières.. C'était juste énorme. Bien sûr, il y avait la presse, le préfet et d'autres personnes importantes qui m'ont serré la main.

On était onze bénévoles de ma ville à partir. On s'était donné rendez-vous au local de la Croix Rouge le matin. J'ai retrouvé tous mes copains/copines et tout de suite, l'ambiance était posée. Café/clopes. On a enfilé nos tenues Croix-Rouge, on a chargé les camions en matériel et on est parti à deux camions, en convoi avec les gyro' et tout. Une heure de route jusqu'à St Brieuc où on a rejoint tous les autres bénévoles Croix Rouge du département et du 35 (Rennes). On a fait un briefing vite fait pour répartir les rôles. Mais on ne savait toujours rien sur la catastrophe ni à quelle heure on allait être déclenché. C'était le but. Après le brief', on était parti pour daller et la gendarmerie nous appelle pour le déclenchement. Le temps de tout rassembler, de partir à cinq camions en convoi plus le SAMU du 35 et d'arriver sur les lieux, on a mit 47 minutes. Autrement dit, il y a du boulot à faire là dessus. Sur place, on est accueilli par la gendarmerie maritime qui nous explique la situation. Un naufrage a eu lieu en pleine mer. On savait pas encore combien de personnes à bord, combien de blessés, de morts, etc. Etant donné que chacun avait son rôle défini, on a été vite opérationnel. On a sécurisé le secteur, monté les tentes, installé l'accueil, la nourriture, les vêtements, les kits d'hygiène, etc. Puis moi je me suis détachée et j'ai été brancarder et récupérer les indemnes. J'ai fait les norias pédestres jusqu'aux tentes en distribuant les couvertures de survie. Mon but était donc de récupérer toutes les personnes non blessées et d'assurer leur soutien psychologique. Et tout le monde a joué le jeu. Après les avoir ravitaillé, mon but était de réunir les familles et de donner des nouvelles des femmes, des enfants, etc. De mon angle de vue, j'ai aperçu les hélitreuillages avec le bel hélico de la marine et c'était juste un truc de fou ! 

Puis une fois, tout terminé, on s'est tous réunis et on a mangé comme des porcs. x) Yavait énormément de monde. J'ai rit, j'ai pleuré, j'ai crié, j'étais au taquet. C'était une aventure hors du commun. En une journée, j'ai évacué plus d'adrénaline que pendant mes six derniers mois.. J'étais juste frustrée de pas avoir fait plus de soins mais tout ça, c'était le rôle des médecins et pompiers. Nous on tenait la cellule psychologique. 

 

Et je peux vous dire que c'était une sacrée organisation. Bien sûr, il faut imaginer qu'en situation réelle, tout le temps est multiplié par trois en moyenne. Mais on était déjà très bien organisés. Il y avait juste un manque de communication entre les différentes parties mais les simulations, c'est ça aussi. Voir ce qui cloche pour l'améliorer.


Malgré tout le stress de la situation qui m'a envahie, je me suis dépassée, j'ai jamais été débordée par la situation et j'ai réussi à garder mon sang-froid en toutes circonstances. Je me suis jamais sentie vulnérable. Lundi dernier, j'ai encore découvert une autre facette de ma personnalité que je ne connaissais pas. En situation de grand stress, je maîtrise parfaitement la situation parce que je sais ce que je dois faire, c'est inné, j'ai pas besoin de me poser trois mille questions, ça vient naturellement donc je panique absolument pas. Par contre, après, quand la pression redescend, c'est assez violent. Je suis totalement vidée et j'ai besoin de temps pour me retrouver.
Je me jette pas de fleurs mais j'avais besoin de savoir ça.

Mais j'vous dis, j'ai pas de mots pour décrire tout ce que j'ai vécu pendant cette journée. Je suis rentrée vannée mais heureuse. Et j'en garderai un très bon souvenir. C'est du partage, des sourires, des remerciements, des liens qui se créent et tout ça, ça vaut de l'or.
Et on forme vraiment une équipe de choc. J'ai l'impression d'être totalement intégrée dans le groupe. J'y ai largement ma place et ça aussi, ça fait plaisir.
 

Hier soir, j'ai fait ma première maraude à la Croix Rouge avec le Samu social. Et j'ai passé un moment très agréable, humain et plein de rencontres.

Nous étions quatre. Trois hommes et moi. Avant de partir, nous préparons tout ce qu'il nous sera éventuellement nécessaire. Autrement dit: Une trousse de premiers secours, un DSA (=Défibrillateur Semi-Automatique), deux trousses de soins avec dans chacune quelques kits d'hygiène, du café, du thé, de la soupe, un thermos d'eau chaude, couverts et assiettes.. Une fois tout ça prêt et checké, nous appelons le 115 pour leur signaler que nous partons.
Puis nous chargeons le camion et c'est parti mon kiki. Et on fait tous les secteurs de la ville susceptibles d'être occupés. On vérifie les toilettes publiques, les quais de gare, les halls d'immeuble, les coins de rue.. Au début nous étions tous groupés puis on s'est séparés en deux groupes. L'un a fait le haut de la ville et l'autre le bas. 
Lorsque nous rencontrons des gens, on leur propose à manger, à boire, un kit d'hygiène. On discute avec eux. Et on essaye de leur décrocher un sourire.
Une fois tout ça fait, nous nous sommes arrêtés à un endroit et nous avons attendu. Et là, les habitués arrivaient, par dizaine. Parfois ne demandant rien si ce n'est un peu de chaleur humaine, une écoute, un conseil. Et puis en discutant avec les gens, on se rend compte que ça peut arriver à n'importe qui. C'est comme ça que j'ai appris que la petite dame complètement démente qui déambule dans les rues de la ville avec un cabas et qui ramasse tout ce qu'elle trouve par terre était clerc de notaire, elle avait un mari, des enfants et qu'un jour, elle a pété un plomb et a tout quitté. Aujourd'hui, elle dort sous les ponts, est suivie en psychiatrie et n'aligne pas deux mots.

Il y a des tas de choses que nous n'avons pas le droit de faire. Comme enjamber une barrière, dépasser notre secteur, aller dans les squats, nettoyer une plaie, etc.. Nous devons appeler le 115 qui lui, gère la crise. Il y a d'ailleurs une formation obligatoire où je me suis inscrite pour le mois de septembre à faire et qui délimite justement notre rôle.
En cas de déclenchement grand froid ou canicule, on s'engage à être appelé à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. Et dans ce cas, les maraudes se font tous les jours et plus qu'une seule fois par semaine.
Puis on rentre, on rappelle le 115 en leur faisant un rapport détaillé de ce que nous avons fait.

J'étais fière avec ma tenue orange fluo, j'attirais le regard, le sourire et parfois même un "Bonsoir" des touristes curieux. Mais j'étais surtout fière d'être là pour les autres, de leur apporter ce qu'ils recherchent sans jamais le trouver, un peu de réconfort, d'écoute et d'attention. Bien sûr qu'il y en aura toujours qui refuseront notre hospitalité. Mais notre rôle n'est pas de les obliger à quoi que ce soit mais simplement de leur faire savoir que nous sommes là.

Je reviens de mon troisième jour à la Croix Rouge. J'y suis allée mardi aussi. Aujourd'hui, j'ai fait du vestimentaire encore. J'ai chargé un camion de trente sacs de vêtements qui partent parce que nous on les prend pas. J'crois bien que j'me suis pétée l'dos mais peu importe. J'ai encore trié, plié, rangé. Mais aujourd'hui, j'ai surtout fait de l'alimentaire. Le centre ferme demain alors tout le monde vient chercher de quoi manger pour un mois. Alors j'ai distribué de la nourriture, j'ai scanné, ça affiche le prix sur l'ordi et voilà. Je vous passe la paperasse qu'il y a à faire pour chaque personne mais en gros, aujourd'hui, mon boulot, c'était ça. J'ai dégivré et nettoyé le frigo. J'ai renversé une boîte de semoule que yen avait partout et que j'en ai chié pour tout balayer. J'ai remplit les placards. On donne aussi des bons pour ce qu'on a pas/plus. Pour que les gens puissent aller au supermarché. On donne aussi des bons pour le gaz et l'essence.
Et là encore, j'ai vu la misère et je m'estime plus qu'heureuse de manger à ma faim tous les jours. C. qui est là depuis trois ans, me racontait les histoires de chacun et vraiment, c'est triste. Il y a celle qui est enceinte du sixième parce qu'elle était jalouse de sa voisine qui vient d'accoucher alors qu'elle a même pas un rond pour nourrir le premier. Il y a la mère de famille qui vient pour trois générations. Il y a la déglinguée qui s'est fait virer de tous les squat' et qui revient dix fois pour demander du café. Il y a..
Ce qui est frappant, c'est de voir les gens qui ont des enfants prendre pratiquement que de la nourriture pour eux. Compote, soupe, céréales à mettre dans les biberons, couches.. 
J'ai pu ramener des yaourts à boire à la maison vu qu'ils sont bientôt périmés.


A part ça, j'ai aussi rencontré le responsable du Samu Social. Je commence donc les maraudes du mardi soir le 31 juillet. C'est de 19h à 22h et on parcoure les rues et on donne à manger et à boire aux sans abris, des couvertures pour passer la nuit et quelques ustensiles d'hygiène. Pour ceux qui veulent, on leur propose des hébergements d'urgence en relation avec le 115. 
J'imagine que "l'été" ça doit tout de même être différent que l'hiver pendant la période de grand froid mais quand même. Je suis plus que prête.



Je me suis également inscrite pour la formation de secourisme, le PSE 1 (= Premier Secours en Equipe de niveau 1.) J'ai déjà fait cette formation avec l'école d'infirmière mais mon diplôme de secourisme ne vaut rien à la Croix Rouge donc je reprends tout à zéro et ça me fera pas de mal. PLS (= Position Latérale de Sécurité), massage cardiaque, enlèvement de casque, etc..

Je rencontre de plus en plus de gens, je suis de plus en plus active donc de plus en plus impliquée et je suis ravie ! J'ai l'impression d'être là depuis des années. Tout le monde me connait et me tape la bise. Le problème maintenant, c'est quand je vais reprendre le travail et que je n'aurai plus tout ce temps pour me consacrer à la Croix Rouge et je sens que je vais être bien malheureuse..