C'est la frustration.
La frustration c'est aussi être au maximum de ses capacités et ne pas y arriver.
Je sais pas si ça vous est déjà arrivé. D'avoir l'impression d'être deux personnes. Que la tête et le corps soient dissociés. Comme si l'un n'était même plus à la merci de l'autre. Parce que vous avez perdu le contrôle. Je sais pas si vous vous êtes déjà dit que non, c'était pas possible que ce soit vous qui en soyez arrivé là. Que c'est tout de même pas vous même qui avez réussi à faire de votre propre vie un enfer, un dégoût permanent. Rejet. Comme si vous vouliez à tout prix vous en débarrasser. Un des deux. La tête ou le corps. Bah moi, c'est exactement ce qui est en train de m'arriver.
Et toujours ce regard des autres. Etre à la hauteur. Parce que si vous échouez, ils vous attendront au tournant. Ces bâtards.
Parce que qui n'a jamais rêvé d'en foutre plein la vue à tous ceux qui n'y croyaient pas, à tous ceux qui vous narguent en silence en attendant le moindre petit échec pour vous achever à coup de je-ne-sais-quoi. Qui ?
Ne pas décevoir. Pour tout ceux qui ont mit toute leur fierté dans votre réussite. Maman. Poupinou. Et
J'ai peur aussi de ne plus jamais me retrouver. Ne plus jamais être celle que j'étais avant et que j'aimais tant. Celle qui riait de tout. Celle qui bouffait la vie à pleines dents. Celle qui luttait contre la maladie. Celle qui n'avait pas de problèmes. Celle qui avait réussi à mettre son passé entre parenthèse. Celle qui sauvait le monde avec sa folie permanente. Celle qui disait merde aux futilités. Celle que tout le monde aimait pour ça.
La fascinée. L'hystérique. La chanteuse. La joie d'exister. La bulle qui pétille dans la bouteille de Coca. La courageuse. La force. La fraîcheur incarnée. L'amoureuse de la vie. La record woman au Guiness de fous rires en vingt quatre heures. L'anorexique qui s'assume. Le déchet refoulé.
J'ai peur d'être une frustrée à vie qui ne peut pas vivre celle que je m'étais imaginée.
Parce que si c'est le cas, je serai une éternelle dépressive.