Jeudi 5 décembre 2013 [18:29]
Pour pouvoir avancer vers le futur sans trop traîner mon passé et mon présent trop proche comme des boulets derrière moi, j'ai besoin de mettre un peu d'ordre dans ma vie. J'ai trop de choses à oublier, à pardonner mais c'est impossible
pour l'instant et je le sais. Ca s'efface pas, ça. Alors à défaut de pouvoir le faire, je vais effacer tout ce que je peux, oublier tout ce qui appartient au passé et que je peux contrôler. Encore cette histoire de maîtrise parce que perdre le contrôle, c'est perdre la face.
J'ai jeté mon armoire entière de fringues. Ca tient dans six sacs poubelle de trente litres. J'ai même pas cherché à comprendre. Ah si, j'ai gardé un pull de ma mère, un tee shirt de ma soeur et mes pyjamas-doudous
pourris antisek's. Le reste, c'est parti à la Croix Rouge. Et tu peux pas imaginer ce que ça m'a fait. J'ai pleuré. Mais pas pleuré comme ça. Pleuré parce que j'étais soulagée de mettre un terme à mes années collègelycéefacécolded'infirmière. En fait, en virant mes fringues, j'ai viré mon passé. C'est con, hein ?
Ensuite, j'ai dépensé plus de deux mille euros en fringues, chaussures et accessoires divers et variés en l'espace de deux mois. J'ai d'abord eu très peur parce que je me suis demandée si j'allais pouvoir m'arrêter un jour. Avant de comprendre qu'en fait, j'ai juste voulu devenir une femme. Une femme coquette, encore désirable, qui se trouve belle en ouvrant la porte de chez elle, qu'on regarde dans la rue, dans un bar, dans un magasin et ailleurs. J'ai refait toute ma garde robe, pour de vrai, et tu peux même pas imaginer à quel point, ça fait du bien.
J'ai jamais eu ce besoin avant. Jamais. De plaire vraiment, de me trouver belle, qu'on se retourne sur moi dans la rue. Je l'ai ressenti bien sûr, mais c'était pas voulu, cherché. Aujourd'hui, je fais en sorte de.
Ah, il faut savoir aussi que je travaille en civil dans mon service et que je m'habille en fonction des enfants que j'ai en charge, donc des jours. Mon emploi du temps est fixe. Autrement dit, quand je vais à la piscine le mardi, je me prends pas trop la tête. Le mercredi non plus parce que c'est une journée classée sous haute tension. Autrement dit, il me reste le lundi, le jeudi, le vendredi et le weekend pour essayer de faire quelque chose de moi. Alors la veille de ces jours là, je prends le temps de préparer mes affaires. Et je parle du soutien gorge à la paire de godasses. Et de choisir un collier et une paire de boucles d'oreilles qui iront avec l'ensemble. Je ne sors plus sans.
C'est con mais se rendre compte de tout ça, c'est énorme, pour moi.
Au niveau du corps aussi, j'ai eu un déclic. Parce que je le supportais tout simplement plus. Ca commence par mon bonnet D/E. Le drame qui se joue dans le soutien gorge, c'est quelque chose. Et puis ce ventre, ces cuisses, cette culotte de cheval, ces fesses qui me faisaient regretter mon corps d'anorexique. Alors j'me suis bougée. Je pesais 56 kilos au départ. Aujourd'hui, j'en pèse 51,2 et mon poids idéal est de 50.
Je m'accroche à ma gym tonic et à ma zumba du mardi soir et du jeudi soir. Et qu'est ce que ça me fait du bien ! Autant pour le corps que pour l'esprit, pour le coup. J'me sens déjà moins flagada. T'inquiète, j'ai des preuves. Je me pèse et me prends en photo une fois par semaine.
Et puis j'ai été chez le coiffeur. Deux ans que je n'y étais pas allée. J'ai rien fait de dingue. J'ai juste coupée tout ce qui était abîmé, refait ma frange et dégradé un peu. Il faut que je m'habitue et que ça pousse un peu mais bon, c'pas trop mal.
Alors tout ça, ça en fait du changement. Ca veut dire beaucoup plus de choses que je veux l'écrire ici. Mais j'me sens mieux. Dans ma tête, dans mon corps et j'en avais besoin. J'avais besoin de me trouver belle, moi, pour de vrai. De surtout pouvoir me le dire en me regardant dans la glace et pas seulement faire semblant de croire ce qu'on me dit.
Je change, ma vie change et je trouve le temps là où je ne faisais que négliger ce qui est devenu essentiel pour moi aujourd'hui. Plus que ça même.